Watercooling : le polissage d’un waterblock peut-il apporter un gain dans le refroidissement d'un processeur ?
Watercooling : le polissage d’un waterblock peut-il apporter un gain dans le refroidissement d'un processeur ?
Certains d’entre vous se sont déjà lancés dans le watercooling, que ce soit d’une manière très simple par exemple avec un kit tout-en-un comme celui de be quiet! avec son Silent Loop, d’autres avec des éléments séparés pour monter sa propre solution de refroidissement, adaptée généralement à l’utilisation désirée, que ce soit simplement pour bien refroidir son processeur, ou avoir une solution silencieuse, ou encore se lancer dans l’overclocking.
Si on veut se lancer dans le watercooling, mieux vaut au départ, avant de vouloir investir trop d’argent, passer par un kit tout-en-un. Si l’idée est bonne au départ, il n’en reste pas moins qu’un tel système est généralement conçu à partir d’un cahier des charges précis, avec des contraintes prédéfinies.
En fait, et à contrario avec un système monté de toute main par l’utilisateur, qui choisira chaque élément spécifiquement, le kit tout-en-un peut présenter des avantages et des inconvénients.
Au titre des inconvénients, c’est la base du waterblock, autrement dit la partie en contact avec l’IHS du processeur) qui peut poser problème. En fait, cette base peut être plus optimisée pour certains processeurs que pour d’autres. Pour exemple la base du waterblock du Silent Loop, qui après test et démontage de la configuration, a fait apparaître une surface légèrement convexe au lieu de plane.
Renseignements pris auprès de be quiet!, cette surface a plus été optimisée pour les processeurs Intel qui présentent souvent une surface concave sur leur IHS. Le fait d’y ajuster un waterblock légèrement convexe permet de gommer une bonne partie des irrégularités et donc de minimiser la quantité de pâte thermique entre les deux, renforçant ainsi l’optimisation de transfert des calories entre les deux surfaces.
Bien entendu, be quiet! a également essayé de faire de telle sorte que le montage sur un processeur AMD puisse aussi être efficace, tout en essayant d’optimiser en quelque sorte la surface en contact avec l’IHS du processeur. En effet, l’IHS d’un processeur AMD étant en général bien plus plane que celui d’un processeur Intel, il en résulte donc une surface convexe qui vient en contact avec une surface plane, réduisant ainsi le contact entre les deux à moins de mm² que sur un processeur avec un IHS concave comme chez Intel.
Afin d’optimiser ce contact entre les deux surfaces que sont le waterblock et l’IHS du processeur, certains constructeurs de waterblock ont trouvé la parade, en proposant des réglages à effectuer avec une petite clé, servant à déformer légèrement la surface qui vient en contact avec l’IHS du processeur. Mais dans la cas d’un waterblock comme celui du Silent Loop, il est certain que be quiet! a essayé de trouver une solution qui puisse répondre au mieux dans chaque situation, donc un proposant un compromis, sans pour autant arriver à assurer un échange parfait entre ces fameuses surfaces en contact.
Possédant un processeur AMD, en l’occurrence un FX-8350, avec un IHS plat, je me suis dit que je pouvais optimiser ce transfert de calories entre les deux surfaces, en aplanissant et en polissant la surface du waterblock, tout en gardant néanmoins encore un semblant de surface légèrement convexe au cas où je passerais un jour du côté sombre de la force, à savoir chez Intel, avec l’IHS concave.
Voici quelques exemples d’IHS de différents processeurs, glanés sur Internet. On peut y voir qu’une grande majorité d’IHS de processeurs Intel présente en effet une surface concave, et inversement, une grande majorité de processeurs AMD présente une surface relativement plane. Afin de bien faire apparaître les déformations de l'ILS de chaque processeur, ce dernier a été poncé rapidement avec un grain d'environ 200 grains par pouce.
Afin de mieux comprendre le phénomène, voici quelques illustrations d’abord sans, puis avec pâte thermique. Attention : les déformations sont évidemment exagérées pour bien faire apparaître le problème de base.
Tout d'abord les deux formes de waterblocks, plane ou convexe :
Puis les deux formes d'IHS, chez AMD et chez Intel :
Voyons maintenant les différentes combinaisons possibles sans pâte thermique :
Un waterblock convexe posé sur un processeur AMD, puis sur un processeur Intel. Le transfert des calories est bien plus optimisé sur le processeur Intel, car les formes s'épousent mieux entre les deux surfaces. Si la base du waterblock est trop convexe, l'échange thermique se fera assez mal sur le processeur AMD.
Maintenant un waterbock plane posé sur un processeur AMD, puis sur un processeur Intel. Le transfert des calories est maintenant bien plus important du côté du processeur AMD, et l'échange thermique est mauvais sur le processeur Intel.
Bien entendu, dans ces cas étudiés, il n'y a pas encore de pâte thermique, le transfert thermique se fait alors mal.
Voyons maintenant avec la pâte thermique :
Avec la pâte thermique, le transfert de chaleur est bien meilleur, mais si la couche est trop épaisse, on risque d'avoir un effet inverse !
Voyons d'abord avec un waterblock convexe :
Puis avec un waterblock plane :
Le meilleur transfert se fait donc lorsque les formes correspondent bien, donc un waterblock plane sur un processeur AMD et un waterblock convexe sur un processeur Intel.
Mais comment faire lorsque le waterblock est convexe et que l'IHS du processeur est plane ? Il faut alors enlever la matière en trop, et le plus facile est donc dans notre cas, de polir la surface de la base du waterblock !
Voici donc en théorie ce que donnerait un waterblock poli sur un processeur AMD :
Le transfert thermique se fait bien mieux et devrait permettre de gagner quelques précieux degrés !
Nous allons donc voir comment procéder pour poncer puis polir un waterblock.
Tout d’abord, pour se rendre compte du problème, voici le waterblock après démontage du processeur. La pâte thermique recouvre bien le centre de l’IHS, mais pas le pourtour. Or, avec la puce du FX-8350, qui représente une surface de 315 mm² et ses 1,2 milliard de transistors, présente un ratio d’environ 7/9 (largeur/longueur), et donc une longueur d’environ 20mm pour une largeur d’environ 16mm. Ce qui veut dire qu’il faudrait au minimum, en ne connaissant pas initialement l’orientation du die du processeur sous l’IHS (plaque de cuivre recouvrant le cœur), une surface d’au moins 20mm de longueur sur la même valeur en largeur.
Voici donc ci-dessous l'exemple du contact entre l'IHS du processeur et du waterblock, puis la surface du die d'un FX, en l'occurrence un 9590. Le die du processeur est exactement pareil à celui du FX-8350, et avec le contact entre l'IHS et le waterblock, le recouvrement du die n'est que partiel, ceci pouvant poser des problèmes de surchauffe, voire au pire, de destruction en cas de mauvaise conduction thermique !
Afin de se rendre compte de la surface convexe, deux méthodes sont utilisées, celle de la règle posée sur le waterblock, et celle du reflet d'une mire.
La règle montre bien le jour de part et autre du centre du waterblock.
La mire fait bien apparaître les déformations des lignes sur toute la surface, prouvant que cette dernière n'est pas plane, mais convexe.
La préparation du matériel.
Tout d’abord, il faut une vitre, d’épaisseur conséquente, qui ne puisse se déformer sous la pression de la main sur le waterblock, quelle que soit sa taille. J’ai opté pour une vitre assez épaisse, d’au moins 5mm (ici 12mm), et avec une surface assez grande pour pouvoir y travailler la base du waterblock. Ensuite, et pour éviter que cette dernière ne glisse sur la surface de travail, en l’occurrence l’évier de la cuisine, j’y ai intercalé un essuie-tout, déjà pour maintenir la plaque, et d’autre part pour la stabiliser sur la surface qui n’est pas régulière. Le choix de l’évier est tout simplement du fait qu’il faudra amener de l’eau aux différents stades du ponçage et pour faciliter un nettoyage ultérieur (madame ne poussera alors pas de grands cris à la vue de mon travail !).
La plaque de verre doit bien entendu être propre, exempte de traces diverses, et présenter une surface bien lisse (ce qui est généralement le cas pour une plaque de verre). C’est elle qui conditionnera la planéité finale du waterblock.
Ensuite, un jeu de papier abrasif à l’eau, couramment utilisé par les carrossiers automobiles pour le travail de ponçage avant mise en peinture. Je conseille du 400, 600, et 1000. Si vous ne trouvez pas de 1000, j’ai une autre astuce que je dévoilerai par la suite. Pour information, le numéro indiqué donne le nombre de grains alignés sur une longueur de un pouce (25,4mm). Donc plus le nombre est grand, et plus les grains sont petits et fins, et plus le ponçage sera également fin.
Ce papier sera collé à la plaque de verre avec l’eau, pour éviter qu’il ne bouge, l’adhérence ainsi obtenue satisfaisant parfaitement au travail à accomplir.
On commence avec le 400, pour dégrossir la surface. Il s’agit de bien mouiller la surface du papier de verre à l’eau, et de garder le waterblock bien à plat, sans faire de mouvements oscillants, juste des ronds parallèles à la plaque de verre. On voit bien lors de ce ponçage, que c’est bien la surface centrale qui est attaquée en premier. En insistant un peu plus, la surface s’élargit encore, prouvant que la base du waterblock est bien convexe. Le temps du ponçage dépend bien évidemment de l’état de la surface à obtenir, mais ne sera en aucun cas rapide ! Comptez au minimum 10 minutes, et encore !
Lorsque la surface commence à avoir la largeur recherchée, en l’occurrence pas loin des 400mm² recherchés, voire plus (dans mon cas, je veux encore garder une légère surface convexe dans le cas où je devais monter le waterblock sur un processeur Intel), je passe au 600. Là encore, il faut garder le même mouvement, bien à plat, toujours en tournant sur la surface du papier de verre. Là encore, comptez au minimum bien 20 minutes !
On voit sur la surface la zone cuivrée, puis autour, la zone où le nickel est aussi attaqué. Lorsque la surface semble correcte, on peut vérifier sa planéité à l’envers, avec une goutte d’eau placée au centre du waterblock, et en appuyant ce dernier sur la surface de la vitre. Si cette dernière est plane, on voit la goutte d’eau s’étaler entre les deux surfaces. Sinon, la goutte d’eau ne va pas bien s’étirer !
La surface voulue obtenue, on passe au 1000 (dans mon cas, je suis passé au 800, puis au 1200). Si vous ne trouvez pas ce papier, une astuce est de prendre le papier le plus fin, et d’appliquer une noix de dentifrice sur le waterblock, et de continuer à poncer en rond. Le temps ici se compte en heure(s), tout dépend de l’état de surface, que vous voulez obtenir. Pour ma part, je voulais obtenir une surface brillante, et il m’a fallu bien deux bonnes heures, en changeant régulièrement l’eau chargée des particules de la surface arasée.
Les différents grains utilisés.
Si vous avez du 2000, voire du 3000, n’hésitez pas, mais chaque fois vous allez allonger le temps de travail !
Surtout, n’utilisez pas de produit du type carrosserie pour obtenir du brillant, vous rajouterez une couche de silicone sur la surface, empêchant le bon transfert des calories !
Une fois la surface polie, vérifiez encore une fois sur la plaque de verre avec une goutte d’eau. Cette dernière doit s’étirer un maximum entre les deux surfaces. De même, lorsque vous voudrez retirer le waterblock de la plaque de verre, s’il y a un effet « ventouse », c’est que vous avez réussi !
Le centre est plane, j'ai gardé une partie convexe à l'extérieur en cas d'utilisation ultérieure sur un processeur Intel.
L'effet miroir !
C’est maintenant l’heure de monter le waterblock sur le processeur. Comme lors du test, je vérifie que la portée sur le processeur est bien constante. Un premier démontage de la pompe fait apparaître une pression légèrement insuffisante, liée à la tension provoquée par les deux tuyaux qui renvoient le liquide vers le radiateur. Ainsi la pâte thermique ne fait pas bien le lien du côté où il n’y a pas les tuyaux. Je rectifie avec quatre petites rondelles d’environ 2mm d’épaisseur, permettant aux ressorts de mieux appliquer le waterblock sur l’IHS du processeur. Après redémontage, la pâte thermique est enfin bien pressée partout. Je nettoie donc les deux surfaces et je remets une croix de pâte thermique pour le montage final. La pression de la pompe sur le processeur est plus conséquente, l’échange de calories n’en sera que meilleur !
Application de la pâte thermique au centre de l'IHS du processeur.
Après un premier montage, puis vérification, il s'avère que la pression des ressorts n'est pas suffisante pour contrer la contrainte de torsion des deux tuyaux de circulation de l'eau. Des rondelles d'environ 2mm d'épaisseur vont donc compléter la pression des ressorts pour amener un meilleur contact entre l'IHS du processeur et le waterblock.
Le contact est maintenant bien meilleur, donc nettoyage, mise en place de nouvelle pâte thermique et fixation finale de la pompe. Cette fois-ci, non seulement la zone du die du processeur est bien recouverte, mais l'échange thermique entre l'IHS et le waterblock est enfin optimisé !
Les tests
Pour la partie tests, je refais la même série que lors du test du Silent Loop. Autant dire que si j’arrive à gagner 2, voire 3°C, ce sera déjà bien, surtout en cas d’overclocking !
Pour information, la pièce est toujours à la même température, d'environ 23°C, quelle que soit l'heure de la journée, et la variation est tout au plus d'un demi degré.
Le premier test se fait à la fréquence de 4,0/4,2GHz (en mode Turbo Core), donc aux fréquences d’origine. C’est encore une fois OCCT en version 4.4.2, avec la même température de la pièce.
^ Avant - Après ^
A gauche, les températures du premier test, à droite, celles avec le waterblock poli. Le gain est faible, d'environ 1°C, mais la montée en température est bien plus lente, prouvant une meilleure efficacité du refroidissement du processeur.
La gestion des ventilateurs est la même, et après la période de 16 minutes, il en ressort que le gain est très faible, voire presque inexistant (les ventilateurs ne tournent bien entendu pas très vite).
Le deuxième test se fait à 4,5GHz avec la tension d’origine. Cette fois-ci, les ventilateurs tournent plus vite comme dans le test initial, et le gain est effectif, puisqu’environ de 3°C ! Pas mal !
N'oublions pas qu'avec cette fréquence, le TDP de 125W est déjà largement dépassé, et avec une mesure rapide à la prise, monte déjà aux environs de 180W (par déduction à la puissance absorbée par rapport à 4,0/4,2GHz). Donc environ 3°C de gain sur le test précédent n'est pas une mince affaire !
^ Avant - Après ^
Le troisième test, quant à lui à 4,6GHz et une augmentation du Vcore à 1,45V, avait été arrêté lors de la présentation du Silent Loop, pour raison de température trop haute (j’avais mis une limite à 65°C pour éviter d’endommager le processeur). Cette fois-ci, la température est moins basse, toujours d’environ 3°C, preuve que le polissage du waterblock a servi à quelque chose !
Là encore, le TDP avoisine facilement les 200W, ce gain n'est donc pas anodin, bien au contraire !
^ Avant - Après ^
Il est évident que si j’avais voulu gagner encore environ 2°C, j’aurais dû me lancer également au polissage de l’IHS du processeur, pour parfaire encore le transfert de calories, tout en diminuant fortement la couche de pâte thermique entre les deux surfaces, mais ce n’est pas le sujet de cet article…
Pour terminer, n'oublions pas le TDP initial du processeur de 125W tout de même, qui une fois overclocké peut vite monter à des valeurs proches de 200W, voire bien plus encore, comme par exemple pour un FX-9370 ou encore un FX-9590 ! Donc un gain de quelques degrés est très conséquent dans ce cas précis !
Conclusion
En conclusion, je veux faire comprendre que l’optimisation d’un contact entre les deux surfaces que sont l’IHS du processeur et le waterblock peut effectivement faire gagner de précieux degrés, chers par exemple à ceux qui veulent se lancer dans un overclocking, ou tout simplement s’assurer d’un bon échange de calories pour diminuer par exemple les nuisances sonores liées à la fréquence de rotation des ventilateurs.
Bien entendu, cette technique peut également s’élargir aux bases des ventirads, avec néanmoins l’énorme inconvénient du poids de certains, qui risque de fait d’enrayer le travail de planéité de la base par l’inertie de l’ensemble sur la surface poncée. Cette dernière risque en effet d’être plus convexe que plane, donc c’est un travail risqué si on n’a pas au moins une expérience minimale dans la technique !
Reste à savoir s’il faut privilégier une surface plane ou convexe : là encore, c’est lors du premier montage et démontage que vous constaterez s’il existe ou non un excédent de pâte thermique au niveau des deux surfaces. Sachez également que d’une manière générale, une surface légèrement convexe sied mieux aux processeurs Intel, et une surface plane aux processeurs AMD, mais les choses peuvent évoluer dans le temps !
Maintenant à vous de voir si vous voulez vous lancer dans un tel travail, qui représente tout de même au moins trois heures de ponçage pour un gain qui risque de paraître minime aux yeux d’un certain nombre d’entre vous, et un gain non négligeable pour ceux qui s’adonnent à l’overclocking ou même à un léger surcadençage de leur processeur !